Conseil municipal de Rodez du 21/03/2025 : l'intervention de Joseph Donore sur le plan d'action en faveur de la sécurité

Une fois de plus, la presse locale n'a pas jugé utile de faire état de mon intervention. En voici les termes :

Courant février, la plupart des élus municipaux ont appris, via la presse locale, la convocation d’un conseil municipal fin mars en vue de la création d’une brigade de nuit de la police municipale. Cette décision faisait suite aux dégradations de véhicules intervenues fin janvier dans certains quartiers de la ville.

Des décisions prises dans la précipitation à la veille des élections

La note relative à la sécurité soumise au Conseil municipal DU 21/03/2025, extrêmement sommaire, n’avait pas été préalablement portée à l’ordre du jour de la commission préparatoire au Conseil. Ce qui est inhabituel et n’a pas permis aux membres de l’opposition d’avoir connaissance du dossier. Une pratique peu démocratique habituelle de M. Teyssèdre à l’égard de ses opposants et même de sa majorité.

Une fois de plus, ceci démontre une gestion au jour le jour, avec des décisions prises dans l’urgence face au mécontentement de riverains excédés par des problèmes qui persistent depuis des années. 

Personne n’est dupe de cet intérêt soudain pour les questions de sécurité alors qu’aucune décision n’a été prise pour améliorer la sécurité à Rodez malgré les plaintes des habitant en raison des troubles répétés à l’ordre public ces dernières années.

Pour ma part, depuis 2021, je n’avais pas manqué d’alerter M. le maire, à maintes reprises, d’une dégradation de la situation et d’un manque manifeste de présence de la police municipale sur le terrain. J’avais aussi évoqué la nécessité de renforcer les effectifs de celle-ci. 

Un nombre du policiers municipaux fantaisiste

La note présentée fait état d’un nombre de policiers municipaux à Rodez de 21 (la presse locale allant même jusqu’à en mentionner 27 !!!). En réalité, le nombre exact de policiers municipaux à Rodez à fin 2024 était de 11. Contre 10 en 2020. Le maire inclut à tort les ASVP (agents de surveillance de la voie publique) ne sont pas des policiers municipaux.

Le maire propose de porter leur nombre global avec ASVP à 27 agents en 2026. En l’occurrence, passer de 11 à 18 ou 20 policiers municipaux serait certainement plus réaliste, soit un policier pour 1 300 h contre 2 000 h en moyenne pour des villes comparables. Par-delà le nombre, le plus important est que les policiers municipaux, en tant police de proximité, soient le plus présents sur le terrain. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

La mission des policiers municipaux

 « La police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique » selon l’article L2212-2 du CGCT.

En tant qu’agents de police judiciaire adjoint, les agents de la police municipale outre leur travail de proximité avec la population, ont aussi pour mission de seconder les OPJ (police nationale et gendarmerie), de rendre compte des crimes, délits ou contraventions à leur hiérarchie, de constater les infractions à la loi pénale mais aussi par PV, les contraventions au code de la route et autres outrages.

Les ASVP (Agents de surveillance de la voie publique) ne sont pas des agents de police judiciaire adjoint. Ils ont généralement pour mission de verbaliser les infractions à divers codes et notamment au code de la route et du paiement des droits de stationnement, mais leur rôle peut être plus large.

Le déploiement du système de vidéoprotection

Le rapport annuel du comité d’éthique de vidéoprotection du 21/11/2024, évoqué lors du dernier Conseil municipal, précisait que 36 caméras étaient opérationnelles fin 2023 auxquelles venaient s’ajouter 21 autres en cours de déploiement fin 2024. Ces 57 caméras de vidéoprotection devraient être actives courant 2025 ! Il précisait que 96 caméras supplémentaires avaient fait l’objet d’une déclaration en préfecture dans le cadre de la 2ème phase du déploiement (les mêmes qui sont proposées aujourd’hui !). 

Avec la mise en service de ces 96 autres cameras d’ici 2026, pas moins de 153 caméras de vidéoprotections placées sur la voie publique seront actives, soit près de 6 caméras pour 1 000 habitants. Est-ce vraiment nécessaire pour 24 200 h sachant que la moyenne varie de 1 à 2 pour 1000 h ? Un quasi record de France puisque Paris et Nice approchent les 10 cameras pour 1000, 4/1000 à Nîmes, 2/1000 à Montpellier ou seulement 1/1000 à Toulouse et Bordeaux. Ne serait-il pas plus judicieux de mieux utiliser les caméras existantes plutôt que d’en augmenter le nombre, sachant que le coût moyen d’une camera est de 20 000 € ?

Dans ces conditions, que dire de l’absurdité des 200 caméras annoncées par M. le maire en 09/2023, suite à l’incendie de véhicules à Gourgan ou des 337 annoncées dans la présente note ! Il est vrai que M. le maire mélange les caméras de vidéoprotection installées sur la voie publique avec les autres caméras de la ville, hors voie publique (parkings souterrains, musées, stade) qui relèvent de dispositions spécifiques. 

Une confusion entre videoprotection et videosurveillance 

Bien que disposant d’un système de vidéoprotection homologué, la ville de Rodez n’a pas autorisé la police municipale à effectuer, même ponctuellement, le visionnage en direct des images via le CSU (centre de supervision urbain). La vidéoverbalisation (circulation routière, non-respect des feux, stationnement gênant, dépôt de poubelles interdits…) n’est pas davantage pratiquée bien que la loi le permette.

La note indique que l’objectif est de passer de la vidéoprotection à la vidéo-surveillance en transférant les images du CSU (centre de supervision urbain) à la Police nationale. Pourquoi entretenir la confusion entre vidéosurveillance (qui concerne principalement les espaces privés) et vidéoprotection (qui concerne les caméras installées sur la voie publique ou les lieux ouverts au public) qui ne permet pas la vidéosurveillance ?

Le système de vidéoprotection déployée par la ville de Rodez a fait l’objet d’une autorisation préfectorale le 25/10/2016, en conformité avec les dispositions des articles L 251-1, L 251-2, L 252-1 et L 252-2 du CSI et la loi informatique et liberté n° 78-17 du 06 janvier 1978. Dans ce cadre, la vidéoprotection permet la visualisation en direct des images par les agents de la police municipale assermentés. Mais il ne s’agit en aucun cas de vidéosurveillance au terme de la loi française. 

Le Conseil d’Etat, comme la CNIL, ont précisé que le traitement automatisé de données personnelles, c’est-à-dire le rapprochement d’une image avec les données d’identification d’une personne est par contre assimilé à un système de vidéosurveillance. Idem pour la surveillance algorithmique. Par contre, le simple visionnage d’images de personnes, notamment dans le cadre de la vidéoprotection, ne constitue pas un traitement de données. L’image d’une personne n’est pas, en elle-même, une donnée à caractère personnel.

L’armement de la police municipale, bien que nécessaire, ne règle rien

Les policiers municipaux devant intervenir dans des situations de plus en plus complexes, le maire propose de permettre son armement létal pour garantir leur sécurité. Si l’armement semble nécessaire pour sécuriser les interventions d’une éventuelle brigade municipale de nuit, la priorité doit être la formation permanente des policiers municipaux pour leur permettre d’assumer les missions en toute sécurité et avec une plus grande efficacité. Il y a un manque important dans ce domaine que l’armement ne saurait palier.. 

Les maires ont une responsabilité majeure en matière de sécurité publique

Contrairement aux affirmations du maire lors du dernier Conseil, la sécurité publique est une responsabilité partagée avec les services de l’Etat et le simple déport des images du CSU vers la Police nationale n’est pas de nature à lui transférer la pleine et entière responsabilité de l’ordre public qui est une responsabilité partagée avec la commune.

L’article L132-1 du CSI (code sécurité intérieure) précise d’ailleurs : « Le maire concourt par son pouvoir de police à l’exercice des missions de sécurité publique et de prévention de la délinquance », sauf en cas d’accident, de sinistre ou de catastrophe qui sont dévolues à la police nationale ou la gendarmerie.

L’article L2212-2 du CGCT indique : « La police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sureté, la sécurité et la salubrité publique ». 

L’article L511-1 du CSI dispose enfin : « Les agents de la police municipale exécutent, dans la limite de leurs attributions et sous son autorité, les tâches relevant de la compétence du maire que celui-ci leur confère en matière de prévention et de surveillance du bon ordre, de la tranquilité, de la sécurité et de la salubrité publique ».

Une fois de plus, M. Teyssèdre est pris en flagrant délit de mensonge en affirmant que le maire n’aurait aucune responsabilité en matière de sécurité publique. Une fois de plus, ce sont les autres et notamment les représentants de l’Etat qui sont responsables … Pas sûr que les ruthénois soient dupes.

Une information insuffisante pour juger de l’efficacité du plan proposé 

Le caractère sommaire de la note soumise au conseil municipal, qui ne comporte strictement aucun calendrier ou éléments de mise en œuvre des moyens proposés, ne permet pas de juger réellement de la portée du dispositif de sécurité envisagé et de son efficacité réelle. De même, aucune mention ou information n’a été donnée concernant des points aussi importants que :

La convention de déport de la vidéoprotection au profit de la police nationale,

la convention de coordination entre la police municipale et la police nationale 

l’évolution du nécessaire continuum de sécurité,

la doctrine d’emploi de la police municipale.

En conclusion

Une fois de plus, face à l’urgence et la pression de la population, M. Teyssèdre se lance dans une opération médiatique tous azimuts pour tenter de rassurer en n’assumant pas ses responsabilités dans la dégradation de la sécurité publique et en rejetant la responsabilité sur l’Etat. 

M. le maire oublie de dire que l’ordre public reste une responsabilité partagée avec les services de l’Etat et qu’à ce titre, en tant que maire, son pouvoir de police lui impose d’intervenir dans le domaine de la sécurité publique et la prévention de la délinquance. Il s’agit là d’une des missions régaliennes des communes de laquelle il s’est totalement désengagé.

L’inaction du maire de Rodez en ce domaine est flagrante. Pourquoi avoir laissé la situation se dégrader et attendu la fin du mandat pour envisager de prendre de mesure pour lutter contre l’insécurité.

Un catalogue de mesures hétéroclites ne suffit pas à constituer une politique crédible et efficace face à la montée des incivilités, de la criminalité et des trafics de toute sorte. Il faut pour cela une réelle volonté politique que je ne perçois pas chez M. Teyssèdre. Je crains que cet intérêt tardif de M. le maire pour la sécurité ne soit que de la poudre aux yeux à la veille des élections municipales.


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